Il y a quelques jours, je suis tombé sur une jeune femme au foyer. Enfin, elle était dans la rue, mais je veux dire qu'elle n'a pas repris le boulot après son accouchement. C'est devenu tellement rare, incongru même, que je lui ai pris la photo. Un, parce qu'elle était toute mignonne avec sa poupée qui n'avait que son petit museau émergent d'un gros anorak ; deux, je la connaissais bien et depuis longtemps ; trois, j'avais son autorisation ; quatre, n'étant pas sur les résos-socios, elle ne risquait pas de se retrouver sur fessebouc, ouatesape et encore moins X, d'autant qu'elle n'était pas à poil… D'ailleurs je ne sais plus pourquoi je vous raconte cela ? Ah si ! c'est que par ces semaines pesantes, je veux dire chargées, lourdes, je ne trouve pas inopportun de me déplacer sur des sujets polémiques un peu plus digestes. Si, hier j'ai quand même raté cette info extraordinaire sur laquelle j'aurais pu m'étendre et même m'étaler sur le dos en ronronnant avec délectation. Ce sénateur, Joël Guerriau, qui en droguant une députée à l'ectasie - sûrement pour la faire rire ! - a en quelque sorte vengé le palais du Luxembourg, trop souvent dévalué, voire méprisé par le palais Bourbon. Manque de peau (ou de pot) c'est encore un homme qui s'est rendu coupable de ce comportement abusif honteux et un tantinet tordu. Il ne manque qu'un élément à notre curiosité : le nom de la députée. Je ne vois d'ailleurs pas en quoi le fait d'être victime d'un sénateur indélicat, justifie un tel anonymat, mais enfin ça la regarde ! Il fut un temps où, travaillant dans des milieux autorisés (formule prisée par Coluche et Renat) j'aurais pu sans peine connaître son identité… Tant pis pour vous ! Mais ce serait tout de même bien plus drôle, si un jour, c'était une femme députée - disons Raquel Guarrido, parce qu'elle m'inspire avec son physique de rugbywoman - qui se fasse un sénateur. Je pense à Bruno Retailleau, un peu pour son physique désavantageux et un peu aussi parce que ça le dériderait peut-être. Bon je sais bien, cela relève du fantasme, mais quel dommage tout de même !
J'en était à ma petite bonne femme, on va l'appeler Mégane – oui je sais, ça fait un peu Renault, mais c'est toujours mieux que Captur ou Laguna ! - Elle n'a peut-être pas trente ans et comme je ne suis ici que depuis sept, je l'ai toujours vu travailler au village. Mais il y a six mois, elle a fait un bébé. Une petite Clio (ben oui, naturellement ! s'exclamerait mon amie Danielle, la Nivernaise). De nature gracieuse, la jeune maman m'est apparue, mieux que ça : épanouie. Heureuse. Vous allez rire, la cause principale de sa joie - outre que l'enfant va bien – est tout simplement qu'elle a décidé d'arrêter de travailler ! Vous comprenez mieux pourquoi j'ai choisi de préserver son anonymat. C'est que par les temps qui courent, il n'est pas nécessaire d'être Juif, Palestinien, militant de gauche ou arbitre de l'équipe de France de rugby, pour se faire lyncher ! Une femme qui décide de ne pas se lancer dans la compétition de l'entreprise, travailler plus pour gagner plus, arriver la première au boulot et monter dans la société avec les dents... Inutile de vous dire que celle-là n'a rien de compris. Et s'il le faut, quand son mec arrive du boulot, il a la table mise et la soupe chaude ! Quelle honte ! Et pourquoi pas aussi avoir changé le bébé, lui avoir fait prendre son bain et plus tard, même, lui apprendre à dire merci et l'aider à faire ses devoirs. Du coup le mâle n'aurait qu'à jouer avec le petit, profiter du bon, sans mettre les mains dans la merde… Non, en plus j'exagère, parce que même si la maman reste à la maison - j'aimais bien dire au sujet de mon épouse « travaille à la maison » - cela n'empêche nullement le père de participer aux tâches quotidiennes du foyer. Alors je ne vais pas encore m'accorder aujourd'hui avec mes ami(e)s féministes, souvent de gauche - ils/elles n'ont pas toutes les tares ! ( je plaisante, je plaisante) -, mais il est un fait que la société se porterait bien mieux si un seul des parents travaillait. Je suis né dans une famille où seul le père partait au turbin à grand' peine d'ailleurs et nourrissait la famille ; nos enfants ont grandi avec leur maman à la maison disponible et sereine. Je ne dis pas que mon frère et moi avons été des modèles du genre, ni que nous avons fait exactement de nos enfants ce dont on rêvait. Mais nous avons tous pu mesurer ce que cela pouvait générer de bien-être. Le contraire de ces gens qui se lèvent aux aurores pour finir les tâches ménagères - entamées la veille fort tard -, puis lever les gosses, les laver, les faire déjeuner. Comme il faut faire vite, ils sont déjà de mauvais poil, du coup on leur laisse manger ce qu'ils veulent devant la télé. Généralement le plus cher et le moins bon pour la santé. Ils n'aiment pas le jus d'orange naturel ni le lait, alors qu'ils prennent un soda et deux kinder bueno. Pour éviter les bouchons, on part une heure avant, chacun avec sa bagnole, c'est pas grave l'empreinte carbone, on aura le temps d'y réfléchir à la retraite… si on n'y arrive ! Les gamins iront se geler et s'emmerder au périscolaire - idem le soir après la classe -. Puis c'est le sprint, les zigzags entre les poids-lourds pour gagner deux places dans les bouchons. Ça y est, ouf ! Pile à l'heure. Un coup de déo et de peigne dans l'ascenseur, arrivé le premier pour le brainstorming, la directrice m'accueille avec un petit sourire entendu, c'est bon pour ma carrière, les autres vont en prendre plein la gueule… Et en plus je sens que j'ai un ticket avec elle, on sait jamais ! Et toute la sainte journée c'est la compétition. Dans la banque, chez Nestlé, à Carrefour, au cabinet dentaire, où vous voulez. C'est pareil. Alors c'est sûr ! Vous existez socialement, parce que c'est important ça : exister ! Et puis à la fin du mois, y a pas que le macho qui participe aux remboursements d'emprunts. Et il va passer le balai maintenant, plus vite que ça, pendant que je mets le gratin dauphinois Tout-par-frais au micro-onde. Bon ça y est, on commence à décompresser… Ah merde ! Et les gosses ! Où sont les gosses ? Non, je déconne, on les a pas oubliés à l'école. D'ailleurs on les entend, ils sont sur-excités. N’arrêtent pas de se disputer depuis qu’on les a récupérés : « les enfants, prenez vos tablettes et restez tranquilles, on va bientôt manger. » A table ils font la gueule, z'aiment pas le gratin dauphinois, l'est tout brûlé et l'est pas bon ! Ok, ok - tous les parents disent tout le temps ok,ok ! - si vous êtes sages, vendredi on ira au restaurant. Ouiiiiiii ! Et qu'est-ce que vous voulez comme cadeaux cette semaine : un téléphooooonnnnnnnne ! Bon, question pognon, c'est ça qu'y a de bien, on n'est jamais gêné aux entournures. Pourtant Mégane, elle s’en fout de gagner une allocation de misère. Parce que son mec, il est artisan et gagne correctement son pain ! Et le cadeau à son bébé… c'est elle ! Il va la voir sourire, se balader avec lui, prendre le temps de l'aimer et de le voir grandir. Et puis voyez, c'est mieux avec la maman, plus naturel, enfin il nous semble, nous les rétrogrades du XXe siècle ! Mais si elle a un super boulot et qu'elle y tienne absolument, à exister socialement, à sortir et à s'offrir qui sait, une ou deux aventures, cela pourrait être aussi bien le papa qui reste à la maison . Où bien, en milieu de cycle professionnel, inverser les rôles. La maman reprend son job et le père récupère. Moi, quand j'ai eu quarante ans, c'est ce que j'aurais aimé faire. Parce que la compétition, ça n'a jamais été mon truc. Et puis si vous aviez connu les guignols de Var (et Nice) Matin (ah ! pas sûr qu'ils fassent la pub de mon prochain bouquin !), vous aussi, vous auriez préféré rester chez vous.
Enfin voilà, c'est ça que j'avais envie de vous dire. Et si vous me prenez pour un connard de phallocrate, soyez bien assurés que vous n'y êtes pas du tout. Simplement, ce qu'il y a de plus fort que la réussite sociale - ne vous en déplaise - c'est l'épanouissement personnel et familial ; plus important que la richesse, l'air que l'on respire et la nature qui nous offre son spectacle quotidien et tous les trésors cachés à ceux qui ne savent contempler. J'entends l'objection majeure et criarde que vous allez m'opposer. Pour qu'un des deux parents reste au foyer, il faut que l'autre gagne assez ! Certes, mais plutôt que de payer grassement quelqu'un(e) à vendre des voitures, des appartements, pointer dans une collectivité locale, vivre de la pub ou construire des autoroutes, des piscines et faire voler des avions, il suffirait d'accorder à celui qui reste au foyer, une pension compensatoire convenable. Se lever tôt, aller toujours plus vite ; fourguer les gosses à la crèche, à la garderie, à la colo ; gagner plus et surtout dépenser à outrance, c'est la société libérale qui vous l'impose et qui fait de vous un gentil petit mouton, tout beau, tout propre, tout tondu, tout con ! Con, surtout parce qu'en plus, vous vous croyez libres ! Et un dernier mot pour mes amis réacs de droite - si, si j'en ai et je les garde ! - qui viennent déjà de déchanter à la lecture des cinq dernières lignes : peut-être que Sandrine Rousseau serait en furie si elle lisait cette chronique. Et je lui confirme que je l'emmerde, elle et tous/toutes ces féministes exalté(e)s. Mais si demain elle se présentait contre la Macronie, la Sarkozie et je ne parle même pas de la Walkyrie, je voterais tout de même volontiers pour elle. A condition qu'elle défende aussi et même d'abord, l'égalité entre les êtres humains ici et partout sur la terre. |
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