Pauvre Macron ! Pauvre cron tout court ! On a beau le détester, il faut reconnaître quand même qu'on a tendance à se marrer, à se bidonner jusqu'au malaise. Ah non ! on va pas se mettre à le plaindre non plus. La première fois qu'il s'est présenté, marionnette de la finance, bras armé d'un libéralisme dévastateur, faux-cul de la gauche, faux-nez de la droite, on pouvait encore lui donner du crédit, en estimant que c'était une erreur. Mais en renouvelant les mêmes intrigues, manigances et turpitudes pour y revenir, avec le soutien des mêmes électeurs, là que voulez-vous c'est inexcusable. Rédhibitoire. On ne va pas le plaindre, ni lui accorder la moindre concession, mais avouez, le dernier épisode de la série « en même temps » est à crever de rire. Comme il l'avait réussi avec les élus locaux atones et déballonnés, souvent incultes et inefficaces, avec le Grand débat consistant à éteindre le mouvement des Gilets jaunes après les avoir gazés et éborgnés, il pensair mettre un terme définitif à la crise des paysans en leur offrant aussi leur défouloir. Sur la scène de la plus grande ferme d'Europe, le salon de l'Agriculture. Et c'est là qu'il s'est pris les pieds dans son épais tapis de démagogie. Il en foule tellement qu'il faut bien qu'il lui arrive de trébucher, même s'il n'est pas maladroit de ses pieds. D'ailleurs c'est bien dommage qu'il ne réfléchisse pas davantage avec ses pieds... Non mais là, le « en même temps » fallait vraiment l'oser ! Tellement habitué à ce que tout passe dans cette immense bergerie – la France - il n'a pas hésité à convoquer pour son Grand débat, les ultra-libéraux de la FNSEA, les réactionnaires de la Coordination rurale, les petits paysans de la Confédération, les patrons de l'agro-industrie et du commerce, mais aussi et c'est là que c'est fort, les écologistes dont les Soulèvements de la terre ! Voici un mouvement qui a subi le feu de la police d'État à Sainte-Soline – où les gros producteurs s'acharnent à vider les dernières ressources des nappes phréatiques pour faire plus de fric –, que le super-flic Darmanin aurait dissout, sans le holà du Conseil constitutionnel et qui se retrouve invité d'honneur de l'Élysée. Incompréhensible ! Et le Rousseau, patron de la surpuissante « Fédé » agricole, l'un des premiers lobbies nationaux avec son complice de l'agro-alimentaire, ne l'a pas compris ! « On n'y participera pas à ton débat ! » qu'il a dit à Saint-Emmanuel-les-mains-jointes, qui jusqu'ici lui mangeait dedans, ses mains ! Je ne sais pas si c'est McKinsey qui le conseille encore, mais à mon avis, cette gigantesque connerie, il doit être assez grand, c'est-à-dire totalement coupé des réalités de ce monde, pour se l'être imaginée tout seul ! Du coup qu'est-ce qu'il fait le président de la République démagogique ? Il rappelle les Soulèvements de la terre, pour leur dire qu'ils peuvent rester dans leurs galeries. « Le chef, il est pas content, il a dit qu'il vous voulait pas pour discuter. » En gros, Rousseau considère les écologistes comme des nuisibles, des empêcheurs de polluer, d'intoxiquer et de tuer en rond. Et bien entendu, eux-aussi, en dehors de l'arc républicain. Ouf, l'a eu chaud le Macron. Rappelle son ami de la finance agricole : « Bon ça y est Arnaud, tout est arrangé, je leur ai fait dire de rester chez eux aux hippies crados. T'es content j'espère ! » Ah ben non qu'il est pas content le Rousseau ! Continue à se rouler par terre. C'est la faute aux faucheurs volontaires ! Il en veut pas de son débat. Y a rien à débattre. On cultive à bloc, on exploite les dernières ressources, on empoisonne les champs, on pourrit les rivières, on coupe les forêts et on fout tous les écolos en taule ! Ça te va comme ça ! Qu'est-ce que tu veux négocier encore ? Y a rien à discuter ! Fin du Grand débat et on n'a pas fini de rire. Comme pour les Manouchian au Panthéon. Là ce qui m'a fait marrer, c'est tout le foin autour de l'Affiche Rouge. Et notamment de la soi-disant ma-gni-fi-que interprétation de Feu ! Chatterton. L'a beau avoir un non de rafistolage, cela sent encore fort le copinage. Faut dire que le groupe de rockers ne s'est pas formé dans un sous-sol d'immeuble de Villetaneuse, ni dans un maquis de Corrèze, mais dans les très chicos 5e arrondissement de Paris, au Lycée Louis-le-grand, ma chère, créé par des Jésuites et qui a offert à la République un nombre incalculable de pignoufs dont quatre présidents et juste neuf premiers ministres ! Autant dire que le chanteur propre sur lui, avait toute sa place pour blasphémer l'œuvre qu'il interpréta d'ailleurs avec la même application que s'il avait passé une audition à la Star-Ac. D'où l'extase généralisée du bon peuple. Les gens savent-ils, - le saviez-vous avant de le lire ici même il ya quelques jours - que l'Affiche rouge, le poème le Louis Aragon, mis en musique et interprété par Léo Ferré, de sa sortie en 1961 jusqu' en 1981 et l'élection de Mitterrand, a été interdite d'antenne ? Vingt ans de censure pour une chanson à la gloire des combattants communistes, immigrés et juifs. Voyez que ce n'est pas Macron qui a inventé le contrôle absolu des médias. Ce sont ses ancêtres du bel occident démocratique. Il n'a fait que les conforter. Les valets du pouvoir, les collaborateurs se reproduisent aussi bien sous les rotatives que dans les studios de radio ou de télévision. Et j'avoue que le comique prend le pas sur la colère, lorsque j'imagine Ferré écoutant sa chanson exécutée ainsi au service du pouvoir. Le pouvoir, comment disait-il ? Ah oui : le pouvoir c'est vraiment de la merde ! |