mercredi 26 avril 2023

 

Bernard Oustrières et Monique - sa Chouchou - venaient souvent 
de Six-Fours, m'encourager à Aubrac sur mer.  

Béo, mon héros au sourire si doux

On se disait : « Tant qu’il y aura des types comme lui sur terre, on ne désespèrera pas encore de tout. » Mince ! Hier, Bernard Oustrières s’est carapaté. Écoutez, un optimiste pareil, ça m’ennuie de le soupçonner, mais je me demande quand même s’il n’a pas décidé de fuir. Oh ça ! ce n’est pas qu’il manquât de courage. Si cette vertu était cotée en bourse, il se serait enrichi. Il y a de ce point de vue là aussi, tellement d’indigents.

Accablé par la maladie, il a néanmoins dû s’incliner. C’était un machin au cerveau. Ne me demandez pas le nom, on me l’a dit cinq fois et cinq fois je l’ai oublié. Mais enfin, je ne vous livre pas une révélation, un scoop comme l’on disait à La Marseillaise, Var Matin-République, France Soir où il posa - entre autres – sa plume fine et délicate, c’est vraiment con, la maladie ! Aller s’en prendre au cerveau de Béo ! Elle a trouvé que lui, la maladie ? Si elle m’avait demandé, je lui en aurais fourni des listes interminables et pourtant non exhaustives, de cervelles étriquées. A attaquer ! C’est pas que je veuille de mal à grand monde, c’est même que je ne veux de mal à personne, mais le cerveau de Béo ! Non mais je vous jure. C’est comme s’en prendre aux doigts de Chopin, aux jambes de Pelé, à la queue de Bocuse ou au cul de Tabatha Cash ! Bon l’avant dernière l’aurait peut-être fait sourire, la dernière m’aurait valu des remontrances. Et si je me permets cette digression peut-être dérangeante à certains, c’est que durant plusieurs années, lorsque je chroniquais du fond de mon restaurant de souffrance toulonnaise, il n’y avait que lui pour me donner une réplique rubescente, indulgente, réconfortante.

Parce que Béo - entre nous, c’était Béo, mais cela pouvait être B.O pour d’autres ou Bernard tout simplement -, ne limitait nullement son talent au trait de plume et à l’information qu’il servait ou aux romans qu’il sublimait. Il possédait ce talent, tellement plus rare, plus estimable encore, de la tolérance, de la magnanimité dans l'existence. Ce fut, je me souviens, sans que cela nous condamne à une rupture qui m’eût paru insoutenable, justement cette ouverture d'esprit - dont je demeure incapable - qui fit souvent débat entre nous, ces dernières années. Fils de militant communiste, engagé lui-même dans des mouvements de gauche, voire anarchistes, il s’était, pour finir, un peu préservé de toute utopie, de cette exaltation militante et cela m’exaspérait. De son beau sourire - si, si, je vous assure, le sourire de Bernard Oustrières est l’un des plus expressivement subtils que j’aie jamais reçu – il me morigénait quand même, soulignant, d’un rouge éblouissant, mes écarts de langage, quand ce n’était pas de pensée. Je lui trouvais alors des accents détonants de vieux bourgeois décadent. J’étais à bout d’argument, il ne devait guère goûter la déclinaison… Aujourd’hui, je sais que j’avais tort ! Mais demain, je reprendrai mon combat. Le même ! Il ne sera plus là pour l’amender.

Ce n’est plus de courage dont il fit usage, lorsque Monique, sa compagne, sa « Chouchou » tel qu’il l’appelait avec ce velours qui emplissait sa bouche et couvrait son auditoire, fut frappée de cette maladie neurodégénérative, autre fléau qui affecte, y compris, les meilleurs esprits. Quelques longues années où, comme il y était prédisposé, ce puits de culture, ce compagnon rayonnant, s’effaça jusqu’au point de disparaître. Plus rien ne comptait que l’accompagnement de cet être qu’il avait aimé déraisonnablement - comme on doit aimer - et qui finit hélas, par tant le peiner.

Depuis lors, ce n’était plus le même Béo. Il n’en était pas moins beau. Combattant de l’amour fidèle, unique, jusqu’au désespoir. Elle reste là, mais où (?) et tellement seule sa « Chouchou » dont il fut séparé depuis que sa maladie l’invalida à son tour. Ne me demandez pas par quelle décision inepte, quel parti pris ignominieux, ils furent arrachés l’un à l’autre. Faut-il que ceux qui en ont décidé ainsi - qu’ils soient de la famille ou du corps médical - ignore toute la sensibilité de ce couple, ou privés de toute conscience et donc d’humanité. Bernard et Monique méritaient de finir leur vie ensemble et peut-être même, de mourir en même temps.

En joignant mon amie LÉA à cet ultime message, je voudrais redire toute ma gratitude à Maryse, notre consœur journaliste de Var-Matin - souvent accompagnée par Nicole – qui resta au chevet de Bernard jusqu’au dernier jour et son entrée dans le coma. Régulièrement elle nous faisait parvenir de ses nouvelles, rarement bonnes, même si, comme toujours dans ces situations, on veut s’aménager quelques plages d’espérance. 
Je me souviens - comme Léa – avoir eu Bernard, il n ‘y a pas très longtemps, au téléphone. « Tiens, comment ça va mon grand ! Je suis heureux que tu m’appelles. Tu tombes bien, ce soir je rentre chez moi… » Jusqu’au bout, il voulut apaiser les autres en dissimulant son chagrin. 
Il ne rentrera jamais chez lui, mais ne sortira plus de chez nous…

Pour ceux à qui Bernard Oustrières manque déjà et d'éventuels nostalgiques d'Aubrac sur mer (si, si, j'en connais !), j'ai retrouvé cette chronique à deux mains. J'en publiais une dans mon blog tous les jours (durant presque quatre ans !). J'écrivais donc un texte et, assez souvent, Béo me le renvoyait agrémenté de rouge, le lendemain, dans une sorte de contrechant de haute volée...  En voici une trouvée par hasard, la seule qui me soit tombée sous la main.  

Quand Cannes... cancane

Quand on me parle de Cannes et de Croisette, je pense inévitablement à causette. Non pas à la petite « protégée » des Thénardier - archétypes du "mauvais pauvre", comme disait le père Hugo, qui préférait les "bons" comme la pathétique Fantine : les Thénardier ont fait des petits mais où sont les Fantine, aujourd'hui ? On vous le demande -   ni hélas à ma merveilleuse copine des temps heureux -, mais à ces discussions futiles, ces logorrhées cinématographiques qui envahissent les studios, les salons et finissent pas se déverser par-delà nos postes de télévision, telle une monstrueuse coulée de bave - coulée à laquelle il est très facile d'échapper : suffit de ne pas regarder la télévision. On en connaît qui font ça depuis plus de trente ans.- On cancane en quelque sorte, jeu de mots very Nice si l'on ose écrire, cher Jaco, le French cancan invitant à l'anglais. Jadis "Var Matin" - le vrai, celui de l'époque rouge - a pu titrer en « une » : " Le festival de Cannes s'est ouvert hier à Nice". La grande presse…

Maintenant, il faut bien admettre que si les chroniqueurs (dans toutes les positions) tirent sur tout ce qui bouge et captent surtout l'intérêt de millions de gens incapables de comprendre ne serait-ce que le titre d'un film de Tim Burton, Dardenne ou Cohen (surtout lorsqu'ils vont par deux), il y a parfois une portée culturelle et sociale qui n'appartient qu'à Cannes.

Écoutez Deneuve. Son point fort, pas plus que la réfection de monument ancien, n'est le structuralisme. Et pourtant elle s'attaque, mon vieux, à une réflexion profonde et systémique, concernant la vie courante à Dunkerque. De mémoire, c'est dire si je peux dévier un tantinet, elle expliquait « C'est d'une tristesse cette ville, c'est un port, mais il n'y a que les cigarettes et l'alcool qui marchent... » - un paradis pour Thénardier(s) -

Ça se voit qu'elle n'a jamais passé une soirée à Toulon... - qui, aux charmes dunkerquois, ajoute l'assent et la rugby mania - Cathy, si tu veux regretter tes nuits au grand nord, mets le cap plein sud. Tu mendieras... des nouvelles !

Après, que Patrice Vergriete, l'heureux édile de cette riante cité du bord du gouffre, s'insurge devant tant de médisances, normal, il fait le job ! Mais on ne le sent pas plus argumenté que ça pour riposter : « Je suggère à Madame Deneuve de revenir séjourner à Dunkerque, car elle est totalement passée à côté... » - en passant à côté, elle aurait pu atterrir à Zuydcoote, station balnéaire réputée pour l'excellence des week-ends que, selon Robert Merle, on pouvait y passer dans les années quarante -.

Et il ne faut jamais jurer de rien.  Car si Madame Deneuve était frappée d’Alzheimer, rien ne permet d'affirmer qu'elle ne prétendrait pas à une admission dans l'une des maisons spécialisées. D'ailleurs, Monsieur Vergriete, voici peut-être une façon originale de redynamiser votre charmant pays surtout connu pour ces chaleureuses centrales de Graveline : devenir la capitale européenne du traitement d' Alzheimer. Certes on n'en guérirait pas, mais on s'en féliciterait, puisqu'on n'aurait surtout pas voulu se souvenir... " - Oubli et néant, c'est tout l'homme" a écrit Théophile Gautier, précurseur romantique de Sartre -

Maintenant trêve de sarcasmes. C'est vrai que dans le Nord, ils ne font pas vraiment « finis », si ce n'est justement aux produits prohibés ou fortement déconseillés. Mais en Bretagne et en Alsace, vous trouvez qu'ils sont mieux ? Avec leurs bonnets rouges et leurs casques à pointe, ils ne marchent pas vraiment à l'eau claire non plus. Et pour le même prix, ils sont quasiment tous complètement snoc. … ce qui les a conduits à voter FN comme des Varois : snoc de toutes les régions, unissez-vous et la walkyrie d' Hénin-Beaumont finira à l'Elysée !

Y a pas plus raciste qu'un Basque ou qu'un Corse, pas plus radin qu'un Aveyronnais, pas plus prétentieux et sot qu'un Bordelais, un Lyonnais, un Niçois. Vous me demanderez sans doute « Et vous les Toulousains, alors ? Vous êtes parfaits ! » Oui, enfin presque ! : Il y a difficilement plus paysan, avec ce terrible accent en courant d'R, on mange gras et on meurt gros... - pas si sûr, l'efflanqué Douste-Blazy, ci-devant maire de Toulouse, auquel on souhaite longue vie, ne dépassera jamais les 45 kilos -

C'est pour dire que Catherine Deneuve, qui doit être native du XVIe (arrondissement, pas siècle !)  - elle aurait pu naître à Vichy eu égard au pedigree de son père…-  pour dégager une telle suffisance toute balladurienne, -"je vous demande de vous arrêter, Jaco !" -  n'a pas complètement tort. Sorti du Trocadéro et de la Croisette, il n'y a guère d'endroit glamour où jouir de ses nuits. - Besagne by night, c'est encore mieux, paraît-il ! - On dit même que certains dans le monde, n'auraient ni le chauffage par le sol, ni de piscine intérieure... Quel manque de classe !

Encore qu'entre les mots « classe » et « ridicule » les notions demeurent relatives et subjectives. - pour les "classes" (sociales) il faut relire Marx -. Un type qui se la pète en audi, avec ses ray-bans et ses frusques à "2000" me paraîtra toujours plus stupide, qu'un gonze sur un solex, avec son casque intégral, ses pinces à vélo et ses soquettes sous les sandalettes - ah ! cette nostalgie de Jacques Tati…-  . Je n'évoque même pas celles qui se font tellement lifter, qu'elles finissent avec la peau des fesses à hauteur du cerveau et se mettent forcément à raisonner comme des trous du cul... Faute d'orthographe ? On aurait plutôt écrit "résonner" surtout après avoir  lu Molière au sujet des clystère carminatifs.  

Jaco et BO

Une autre belle façon de rendre hommage à Bernard Oustrières, est de commander son dernier magnifique roman policier, même si cela doit profiteur à un éditeur beaucoup moins élégant !
Vous pouvez le trouver sur tous les sites de vente en ligne. 

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