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Dessin paru dans Reporterre |
8 .- FAUT-IL TIRER... LA CHASSE ? - Je vais maintenant me livrer à l'exercice que j'aime le moins. Le ni pour, ni contre. Bien au contraire. Ménager la chèvre et le choux. Passer pour un faux-cul. Manier le " en même temps ". Un cauchemar !
Mais c'est ma propension à prendre le contre-pied de tout, qui me conduit ici sur la voie de la tolérance. D'une folle espérance consensuelle, là où chacun semble armé d'un avis définitif. Tranché. Je pense à ces repas entre amis où, imperceptiblement le ton monte, les mots - fléchés - se font acerbes à mesure que les arguments s'effilochent. Et si le vin est bon, si celui qui le sert est généreux, il y en a toujours un pour perdre le contrôle. Il y a deux choses que je redoute à table : les conversations qui s'échauffent tandis que le plat refroidi et le convive qui a le vin mauvais.
Donc la chasse. Il paraît que c'est pas bien de chasser. Tirer sur un animal qui n'est pas venu vous emmerder dans votre jardin, sur lequel qui vous lâchez une bande de clébards à moitié jobards et pour finir une volée de plombs dans le buffet, lorsque ce n'est pas une balle à ailette, ce n'est a priori ni glorieux, ni sympathique. Il y a d'ailleurs dans cette corporation d'un million de sujets environ (deux fois moins qu'il y a 40 ans) une belle proportion d'abrutis qui vous barrent les routes, les chemins de randonnées, les coins de champignons sous prétexte qu'ils font une battue. Ceux qui sont de nature et gâchette chatouilleuses et ne dépareraient pas dans le Kentucky. Ceux qui tirent à tort et à travers, quitte - j'en ai connu ! - à déquiller leur propre frère, leur ami - trop - proche ou leur meilleur ennemi. Une année, je ne sais plus où, c'est un raffinement, il y en a un qui a même buté son fils.
Alors vous comprenez bien que lorsqu'ils en sont arrivés là, ce n'est pas un gentil petit lapin, ou le cul tout blanc, charmant, d'une biche, qui va les émouvoir. Quant à leur manie de vouloir éradiquer le loup et l'ours de nos montagnes sous prétexte qu'ils ne sont pas à leur place ou qu'il leur font une concurrence déloyale, faut reconnaître que c'est compliqué à gober. Surtout lorsqu'ils se font forts, eux, d'assurer par leurs fameux prélèvements, la régulation de nos forêts et notre écosystème.
Bon et puis il y a l'enfance. Celle-là elle s'y connaît pour vous troubler le sentiment, vous retourner même, à l'occasion, le jugement. Je les ai dans les yeux, non loin du coeur, les chasseurs de mes dix ans. Vous savez, l'âge où si l'on a la chance d'être éduqué à la nature, tout paraît plus beau. La silhouette d'un chasseur dans la brume surgit des labours, les aboiements transpercent le silence et pam ! le bruit sec qui le plombe. Est-ce une palombe ? Non un faisan...
Il y a Georges, un paysan du Tarn qui me conduisait dans les forêts de Serviés. Il chassait le tourdre, cousin germain de la grive et comme Ugolin dans Manon des Sources, il disait " c'est une belle lièvre ". Il ne savait pas bien lire mais savait tuer fort à propos la caille ou le perdreau. Je le revois l'ami de mes parents, déposer fièrement sur la table sa gibecière légèrement tâchée de sang et débordant de plumes. Il y avait de la fierté dans cette bouille rouge pleine de sourire sur un béret avachi, déposant ici du bonheur à partager. Et c'est vrai que les pâtés exhalaient ce parfum auquel aucun antispéciste n'aurait su résister et ce civet de marcassin... quelle symphonie en régal majeur.
Et il y a encore Guy, mon cono de Cousin de Montpellier. Mon ami d'abord. Ce n'est pas un sauvage. Presque un notable. Mais son bonheur est dans les bois. S'imprégner d'une nature généreuse qui lui ressemble. Tenez s'il avait aimé la photo, il aurait investi dans de beaux appareils et nous aurait sortis quelques livres d'images fameuses. Mais enfin, moi lorsqu'il vient à la maison - sur notre chasse gardée de l'Aubrac - j'aime autant qu'il me dépose un cuissot de chevreuil sur le plan de travail. D'ailleurs lorsque la période de chasse dont il n'abuse pas, si ce n'est pour aller tirer un chamois dans le Ventoux, est terminée, il part toujours à l'affût de ces beaux cervidés en accord avec ses belles idées et seulement armé d'une paire de jumelles.
Respecter la nature, lui foutre la paix et laisser courir et voler ces bêtes voici ma conviction première. Accepter la chasse au nom d'une tradition séculaire, d'un art de vivre et d'une façon d'aborder l'écologie en y prenant sa part, voilà qui ne me choque pas et que je soutiens même au nom de ceux que j'aime.
Au terme de cette longue introduction, je voudrais sans transition passer à la conclusion. Et à cette autorisation qui serait accordée aux chasseurs de sortir pour tirer le soi-disant nuisible - comme si un chevreuil pouvait l'être ! - tandis que l'on confine le cycliste et que l'on corsète le marcheur dans un périmètre ridicule.
Alors je me dis que ce Willy Schraen, ci-devant président de la Fédération de chasse, est un sacré fortiche. Le roi des lobbyistes, qui a déjà eu la peau d'Hulot, en attendant celle de l'ours...
En plus il a de l'humour le type. Lorsqu'il parle du respect des gestes barrières, (on tire à vue mais on reste masqué pour ne pas risquer de contaminer le gibier) ou encore lorsqu'il invite ses ressortissants à une heure de détente cynégétique (qui rime là forcément avec hygiénique) !
Dans la même veine, il prévient et menace " Nous devons abattre d'ici la fin de l'année 500 000 sangliers. Sans quoi nous courons à la catastrophe."
Et si l'on s'était tous lourdement trompés, y compris Bachelot la grande visionnaire ! Si le principal danger n'était ni la Covid 19, ni le dérèglement climatique mais le sanglier. !
Cela doit être une mort atroce...
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Restez tout de même sur vos gardes, dès fois que Schraen , Artémis et Diane s'offriraient un week-end de chasse à courre |
Que diriez-vous d'ailleurs d'une "Chasse présidentielle"
C'est savoureux et si cela peut permettre à certains
de découvrir l'excellent Frédéric Mey....
de découvrir l'excellent Frédéric Mey....
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