19.- DE L'IMPORTANCE DE LOMBEZ-SAMATAN (19e épisode suite du 31 juillet) - Jiao et Liang avaient retrouvé leurs baguettes - à défaut de tout leurs esprits - depuis qu'ils étaient réfugiés dans le Chinatown parisien. Mais sans vouloir être désagréable avec la Pagode en goguette ou même le plus classieux Temple du Chiang-Su où Dumont-Pourriti avait son rond de serviette de jade, le dîner s'avéra autrement savoureux sous les lambris dorés de l'ambassade de Chine.
Tout de même, sommes-nous bien peu de choses ! pensa le jeune marié. Nous étions les deux Chinois les plus recherchés de France il y a seulement deux jours et nous voici à la table du diplomate le plus influent en ce qui nous concerne. Et en prime, soliloqua-t-il, voici face à moi l'un des plus beaux canards qu'il me fut jamais donné de contempler. Sûr que M. Li Tchi ne considère pas les plaisirs de la table à la légère. Du reste cela se traduisait sur son apparence, une sorte de rondeur accentuée par une taille réduite, une bouille lunaire baignée de soleil car, même loin de sa table, il paraissait toujours éclairé d'optimisme et de félicité. Pourtant il n'y avait à ses côtés nulle femme susceptible d'ajouter à sa béatitude.
Pas d'officielle en tout cas, car Kim - l'énigmatique amie - n'avait pas décliné l'invitation de l'ambassadeur à se joindre à eux. Et puis tandis que le canard, se décomposait au cordeau, sous le couteau expert du maître d'hôtel dont l'aisance n'était pas sans évoquer celle du samouraï, Liang comprit que l'aguichante intermédiaire n'était peut-être pas si étrangère aux lieux ni à son auguste occupant. Elle n'avait d'ailleurs pas choisi une tenue de camouflage pour honorer l'invitation. Dans sa combinaison rouge moulante et pailletée, elle attirait tous les regards, ceux de Dumont compris et seul celui de Liang semblait ne pouvoir se détacher du croupion de la volaille.
Ce ne fut, jusqu'à ce point, qu'un échange de banalités, parcimonieux, car la coutume veut - tout n'est pas à jeter en Chine - qu'on ne mélange pas les mets et les mots. Donc, les rares propos concernaient le repas lui-même en l'occurrence le héros de la soirée.
Li Tchi s'adressa à ses convives, les époux fugitifs :
- 他们是在法国长大的草皮。一开始我带进北京的居民,但他们累了。他们不得不发胖,在附近使人们说话,甚至八卦... -他们不是中国人! -不,他们来自隆贝兹·萨马坦(Lombez Samatan)。但是您知道法国人如果对工作不利,尤其是孩子,他们会知道鸭子的繁殖。特别是在热尔省。如果有机会,尝试他们的鹅肝酱,非常美味...
Les trois se mirent à rire à en perdre souffle.
L'avocat fit alors mine de s'énerver. " Si on vous dérange..." lança t-il en prenant bien le soin de figurer la plaisanterie. Aussi, dut-il ravaler sa salive à deux fois, lorsqu'il croisa l’œil furieux du diplomate qui se referma alors comme une huître. Le malaise s'installait, rendant le tintinnabulement des couverts sur la porcelaine, assourdissant. Un rien inquiétant aussi pour le devenir des deux malheureuses victimes de ce tromaranvirus - qui avait déjà ravagé Bergame, Mulhouse, une bonne partie de la Lombardie, ainsi que l'Alsace - et de leur maladroit défenseur.
Kim, la délicieuse, comprit que c'était à elle de recoller urgemment les morceaux. Pas du canard, elle n'y pouvait plus rien. Mais de la relation qui s'était pourtant gentiment établie. Tout en offrant à son hôte, son excellence, son expression la plus sensuelle et prometteuse - battement de cils et lèvres suaves -, elle poursuivit sur les routes du Gers. Car, si cela vous échappa plus haut - je ne vous en ferai pas le grief tant les cours de Chinois que je vous dispense depuis mars se font moins denses cet été - l'ambassadeur avait expliqué qu'il ne faisait plus venir le canard directement de Pékin car celui-ci arrivait épuisé et il fallait le remettre sur pattes dans les jardins du Palais, ce qui faisait jaser et même cancaner dans tout le VIIe arrondissement. Depuis donc, il s'en remettait entièrement à un producteur français, de Lombez-Samatan précisément. Et comme Liang s'en étonnait, Li Tchi lui avait répliqué qu'il avait tort, car si les Français étaient nuls pour le travail, celui des enfants notamment, ils étaient de fameux éleveurs, comme aurait pu en témoigner ce mulard avant sa fin tragique, évidemment. Intarissable s'agissant de canard, il lui avait aussi conseillé de goûter le foie gras. Il n'avait rien mangé de tel ni de meilleurs de toute son existence. Et vous aussi alors, vous travaillez dans un canard ? s'était bidonné le badin diplomate. Et ils avaient bien ri lorsque Liang avait fini par comprendre qu'en France on surnommait ainsi les journaux...
Bref, des cous d'oie farcis à la culture du maïs, en passant par le Madiran et les exploits du FC Auch, Kim n'épargna rien de sa gersitude à la petite tablée. D'ailleurs Li Tchi retrouva tout son allant en buvant les paroles de sa pulpeuse consultante et s'imaginant déguster deux tranches de foie gras piqués à la pointe de ses seins tendus.
Lorsqu'ils rejoignirent le salon sur les sofas duquel, Jiao et Liang faillirent se perdre dans l'infini moelleux, la conversation prit un tour plus conventionnel. Quoi que toujours convivial et même décontracté.
- Vous me direz des nouvelles de cet armagnac. Un trente ans d'âge, je le prends aussi à Lombez-Samatan. Qu'est-ce que vous diriez, Kim, d'aller vivre avec moi à Lombez ? Nous y créerions la première ambassade épicurienne...
Tout le monde s'esclaffa cette fois et il fallut un certain temps au diplomate rubicond pour récupérer car le malheureux s'étouffait avec l'épaisse fumée de son énorme cigare. Il en avait d'ailleurs collé un dans la bouche de Dumont-Pourriti et même du petit Liang qui évacuait par les narines, les oreilles et menaçait de tomber pour de bon.
Contrairement aux canards, les cigares qui voyageaient mieux, venaient encore de Chine. Depuis la révolution cubaine, les deux partis étaient si liés que leur commerce tombait sous le sens. Mao expédiait riz et thé aux Cubains pour les nourrir, Castro envoyait cigare et rhum aux Chinois pour mourir.
Mais Li Tchi n'en était pas encore là et il avait exigé de ces deux camarades de soirée, qu'ils humectent aussi le barreau de chaise d'un peu d'armagnac. Pour mieux révéler les subtilités de l'un et de l'autre. Les tourtereaux comptaient fermement sur l'avocat pour les reconduire dans le XIIIe et Dumont commençait à se demander par quel bout il allait entreprendre la délicieuse Jiao, vu qu'il n'était même pas certain qu'il tienne encore debout. Finalement, l'ambassadeur qui sait vivre, réveillerait son chauffeur afin qu'il les reconduise.
Puis sans transition, il entra dans le vif du sujet.
- Le mieux, lâcha t-il sentencieusement, c'est que vous ne rentriez pas en Chine !
Était-il fin saoul, plaisantait-il, délirait-il ou disait-il vrai ? Le fond de sa pensée ou une décision déjà arrêtée ? Tous se regardèrent, plongés, dérivant même dans cet océan d'interrogations. Nous vérifierons un de ces jours, la véritable portée de ces propos et le crédit qu'ils méritent. En attendant si vous devez goûter au canard laqué, au foie gras, au cigare, à l'armagnac et même à la confiture de litchi, faites-le toujours avec modération !
17.- PIRE QUE LES ALPES ET LA COSTA BRAVA ! J'avais fondé énormément d'espoirs sur sa majesté COVID 19. Celle qui règne sur le monde avec, il faut bien l'admettre, un luxe de cynisme et de constance. avec la monarchie, fût-elle pathologique, le vieux républicain que tu es ne pouvait être que déçu Elle ne nous a pas encore imposé de nous balader une plume dans le cul, mais avec un masque sur le pif. Et si je ne sais quel serait le degré de satisfaction si on imposait la première évoquée à tout un chacun il faudrait en ce cas ressusciter le regretté poinçonneur des Lilas (ohé ! Gainsbourg) pour percer tous les pantalons, il semblent bien que le second complaise déjà largement. parce qu'il évoque les romanesques bals masqués et les joyeux carnavals Ainsi tous les moutons avancent désormais marqués et ça bêle fort. Belle réserve électorale pour le futur candidat Macron ! Et encore, ceux-là sont comme ils sont, faibles d'esprit mais on a toujours composé avec. Il y a les autres, les ordures. Ceux qui vous fusillent du regard, qui vous engueulent et parfois vous dénoncent, si vous ne porter pas votre étoile jaune du moment. là Jaco, si tu te fais tancer par les fils et filles de déportés, tu ne l'auras pas vraiment volé
Je n'avais pas réfléchi, en me réjouissant du bordel que ce bon petit virus, dont la vocation première n'était pas si mauvaise, puisqu'il s'agissait de rajeunir les effectifs - chose que la canicule est devenue incapable d'accomplir - allait ainsi nous contraindre à marcher masqués, autant dire au pas. Mais bon, seul ce signe distinctif, nous distrait un brin de cette habitude qu'ont nos compatriotes de faire là où on leur impose de faire. phrase un rien absconse mais on sent que c'est très péjoratif
Ce que j'ignorais en frappant dans les mains, non pour encenser les soignants, mais pour glorifier l'attaquant, c'est que cela allait m'emmener devant le nez (enfin derrière le masque), tous les cons que j'avais enfin réussi à fuir au bout de quarante ans et depuis seulement trois étés !pourquoi donc fuir les cons ? Il n'est de compagnie plus agréable Car il faut que je vous le dise, avec toute la gravité que la situation impose, ils m'ont retrouvé. Les parvenus, les bobos, les beaufs, les bidochons se sont rués comme un seul homme sur la Lozère. oh ! misère… Comme le tréponème pâle sur le bas clergé ! Un temps je me suis dit, tiens ! ils ne considèrent plus que c'est le trou du cul de monde, peut-être même qu'ils se sont dit que finalement à 1500 mètres c'était de la haute plaine et que ça pouvait être aussi sympa que la haute montagne à 800 mètres à Morzine ou Chamonix... et sans doute ont-ils lu le fameux voyage avec un âne (en fait une ânesse) à travers les Cévennes de Stevenson Et que c'était très beau, justement cette montagne où l'on voit loin devant, où l'horizon vous donne aussi des perspectives, un goût d'avenir.
La Margeride, les Cévennes, l'Aubrac enfin réhabilités.
Alors très vite j'en suis revenu. Parce que les touristes, quand ils débarquent ils font pas les choses à moitié. Ils débarquent ! débarquer en montagne, il faut remonter à Noé sur le mont Ararat pour trouver un précédent Le D'Day à côté c'était un petit défilé de province, un monôme estudiantin. Qu'ils soient de Paris, de Bretagne, d'Alsace, de Bordeaux où de Grenoble, les habitués de la Costa Brava, de la Côte d'Azur, de Sète et de l'île de Ré, c'est sur mes pieds et nulle part ailleurs qu'ils ont posé leur valise. tes tarses et métatarsiens sont irrésistibles !J'en avais déjà mal au gros orteil et à la tête. Surtout lorsque je me projetais vers cet hiver.
D'ici, me disais-je, à ce que les habitués de Megève, de Val d'Isère, des Arcs et des Deux Alpes ne débarquent avec leurs gros tanks audi et BMW, d'où descendraient les premiers de cordée, suivi d'une demi-douzaine de merdeux et leur maman entièrement remplumée au biotox, cet hiver à la Station du Fer à Cheval ! C'est pour le coup que le père Cariou, Angélique et Benoît risquent d'être alors rapidement surmenés. quitte en se sentir chavirés de bonheur
Enfin, toujours est-il que n'en pouvant plus de tout ce monde, me disant même que je les aurais bien échangé contre ces traînées d'avion qui flagellaient le ciel comme une punition, joli ça, Jaco, tes traits littéraires rachèteront toujours ta misanthropie je n'en étais pas moins bluffé par l'intérêt que portaient les envahisseurs à mon pays. Certes j'en été aussi responsable, tant j'avais youtubé ce territoire à tort et à travers, mais ce n'était rien en regard des ravages qu'avaient pu perpétrer l'affreux Pernaud (el) et son encyclique de 13 heures, les racines et les ailes, Julie et ses carnets, le Jour du seigneur et va-t-en voir quoi, pourvu que cela vienne de la téloche ou des résos ! Jusqu'à ce que mon épouse qui perd encore son temps dans quelques journaux locaux, ait la révélation et me mette dans la confidence de la réalité des choses. C'est, me dit-elle, parce que la Lozère est le département qui fut le moins touché par le virus qu'ils sont tous venus se réfugier chez nous. Un peu comme en quarante avec la zone libre... pourquoi affubles-tu les plaques minéralogiques des véhicules envahisseurs d'un masque les rendant indéchiffrables ? Faut assumer ! On veut les numéros !
Si le département le plus sûr pour passer les vacances avait été la Mayenne, l'Aisne ou la Meurthe et Moselle, ils auraient été déposer le papier souillé de leurs enfants dans des forêts improbables, tremper leur cul flasque dans les eaux du Bréménil, de l'Isle ou de la Bionnière, visiter le conservatoire des papillons de Château-Gontier, la manufacture de tapisseries de Saint-Gobain ou le musée des fonderies de Pont-à-Mousson...
Las, c'est sur mes pieds qu'ils ont posé leurs valises. J'étais content pour Bastide pardi. Mais quand même ! On ne trouvait plus un trou dans le Bés sans que dix cons s'y lavent les couennes ; plus un coin de route sans que les voitures s'y plantent au beau milieu, sans clignotant ni excuse ; plus un chemin vierge de gamins gueulants, de halos de poussière et de papier gras. J'ai vu des troupeaux de vaches affolés, ces vaches d'Aubrac, auxquelles d'aucuns dédièrent un poème d'amour, n'ont finalement pas de caractère des milans royaux à bas la monarchie !perdre leurs repaires et des taillis de framboisiers anéantis en quelques heures.
La Lozère, l'Aubrac fantasmé un demi-siècle et démystifié en deux mois ! Et me voici en quête, éternel voyageur - insatisfait suggéreront les amis libéraux tellement rassurés par tout ça - d'un nouveau coin perdu, haut perché et si possible inaccessible. on te recommande les plages languedociennes Sauf au coronavirus, qui sera toujours le bienvenu...
Mais enfin, s'il y a une justice, M. Moretti, l'année prochaine ils s'en iront ailleurs ! Car avec le monde qui s'est croisé trois mois durant, dans les couloirs d'hôtels, les salles de restaurants, les douches de campings et le lit des ruisseaux et chemins, se serait bien le diable que ce virus ne se soit pas insinué sous quelques masques.
Sans quoi il tomberait encore un peu plus en mon estime... confiance, Jaco, si le pire n'est jamais sûr il est quand même assez fréquent
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