28 .- ÔTANT POUR MOI - Bon, il faut tout de même que j’y aille ! Comment où ça ? A la mine. De crayon. Que je leur écrive à tous ces gens que j’ai rendu dépendants à Macronique. L’un de mes principaux défauts, je veux dire de ceux qui me gâchent la vie, c’est que j’ai horreur de décevoir. Même si parfois je me demande si ne sont pas eux, enfin certains d’entre-vous, qui m’avez abandonné en route. Par exemple ceux qui s’infligeaient une lecture quotidienne et qui par dépit m’ont planté là avec mon périodique. Où êtes-vous Francis, Gérard, Claude… qui me répondiez quasiment tous les matins ? En sommeil, en vacances, en rupture ? L’essentiel est que vous soyez en vie. Jean-Pierre lui par exemple, je l’imagine trop occupé à se prosterner devant le portrait géant de Macron. Ou bien peut-être même déjà en place au camping de Brégançon avec sa paire de jumelles (non pas ses filles, ses longues vues et ses idées courtes…) dans l’espoir d’apercevoir le « grand homme » - et la reine-mère - clapotant dans la piscine à remous (excellente façon d’attiser l’agitation des gilets jaunes) .
Toutefois des lecteurs je le sais, il m’en reste. Bon d’accord j’ai gardé les plus pénibles, à l’exception de ma femme qui ne consent jamais le moindre commentaire et de ma maîtresse, Danielle, qui collectionne précieusement, presque dévotement, mes billets. Si elle veut ouvrir un compte bancaire avec ceux-là, j’aime autant la prévenir de suite que ce n’est pas gagné. Peut-être au Venezuela ? Il y a aussi Gabrielle - autre maîtresse mais d’études supérieures - dont la lecture bien moins ébahie, consiste à sauter sur tout ce qui bouge, à commencer par les fautes dont je m’efforce de parsemer Macronique comme on pourrait le faire dans un magazine féminin estival où il s’agirait de retrouver les sept erreurs. Ou les dix-sept, ça dépend de l’humeur du cronicoeur. Je l’imagine calée sur sa chaise longue, visière sur le front et verre épais, verbe rêche, bave aux lèvres et rire sardonique, appuyant frénétiquement : « Là, y en a une ! Et belle en plus ! ». Comme on chasserait les mouches. Il lui faudra du temps à s’en remettre, car tout de même quelle insulte proférée à l’encontre de notre si belle langue ! Et moi, comme un con, maintenant, chaque fois que je frappe la phrase la plus banale - sans parler de mon inclinaison maladive au néologisme et au bricolage sémantique – je me liquéfie en imaginant que ce que je viens d’écrire est truffé de barbarismes incongrus mais... irrépressibles. Car voici le résultat, ma chère Gaby, je n’écrirai jamais plus cette locution qu’ainsi : « ôtant pour moi ». Histoire de m’effacer.
Et puis, y a aussi le vieux gaulois montalbanais qui cherche à se faire naturaliser six-fournais depuis soixante ans. Vous voyez pas ? Un bon collègue pourtant. Enfin... bon ! Un que j’aurais presque cru « coco » comme moi. Un qui d’ailleurs à renoncé à bien des idéaux ( l’air du Var est fort réputé pour transformer les gens de gauche en maire de Toulon - entre autres - Et c'est pour ça qu'ils sont si rares). Une sorte de psychographe qui n’a gardé de rouge que l’encre de sa plume qu’il jette au mouillage avec une âpreté qui me pique au sang, une alacrité qui m’enchante. Ensanglanté, enchanté, peu importe puisque l’on vibre à écrire, que l’on se sent vivre et que l’on en redemande…
Voilà. En principe je devais poursuivre ma série assassine sur les horreurs et malheurs d’une existence varoise. Les cigales n’en constituant que la face entêtante et obsédante, mais en rien la plus antipathique. Seulement voilà, en déplacement dans le Tarn pour voyage d’affaires filiales, j’en ai oublié mon disque dur avec les notes et photos y afférant. « Un jour tu oublieras ta tête » me disait maman, avant qu’elle ne la perde finalement avant moi. Mais enfin, cela m’a fait plaisir, pour tuer le temps et occuper l’espace, de régler mes comptes avec quelques amis qui disposent d’autant d’humour que moi… Enfin je l’espère...
PS - Je n'ai malheureusement pas le temps de me relire, ce qui donne une chance supplémentaire de gagner le jeu des sept erreurs (et plus suivant l'humeur...)
25.- ÇA SE GÂTE DANS LE TREIZIEME ! (17e épisode, suite du 18 juillet) - L'hôtel, située rue Dalloz perpendiculaire au boulevard Masséna, avait beau s'appuyer sur un joli nom d'esprit "Nuit maline", il ne soutenait aucune comparaison avec le majestueux Louvre Impérial de la rue de Rivoli. Adresse cauchemardesque : la dernière fois que j'y ai dormi, j'ai rêvé que je voguais à bord du Radeau de la Méduse ! Nous étions là plutôt, rue des raviolis chinois mais nous y reviendrons. Sous un lampadaire bancal et encrassé, dans la lumière incertaine, chancelante, un petit tourbillon de fumée s'échappait par saccades de la clope d'une asiatique mature cherchant son équilibre sur des talons interminables. Elle appartenait sans doute à l'ethnie échassière des Hang Perchés qui se sédentarisa au II° siècle entre les fleuves Amour et Sungari Elle parlait fort et lorsqu'elle rejoignait la chambre voisine, ce sont toutes sortes de rumeurs et clameurs enchevêtrées, de chocs, de claquements, de cliquetis mal orchestrés qui se chevauchaient, franchissant allègrement les cloisons et planchers environnants. Tout ce tapage visait sans doute à intimider les punaises La tête surélevée sur ses deux poings serrés, Liang allongé, abattu aux côtés de Jiao qui avait trouvé le sommeil d'épuisement, se désespérait d'en être arrivé là. Sorte de déchéance dont le couple portait une grande part de responsabilité, ce qui n'allégeait pas sa conscience, bien au contraire. Heureusement car trop alléger sa conscience expose à la voir s'envoler Avoir choppé le tromarranvirus au marché de gros de Wuhan, ce n'était pas de chance. Aimer à ce point le ragoût de chauve-souris et le pangolin frit ce n'était pas un crime. Même le choix de la France ne constituait pas en soi et à la base, une destination tellement incongrue. Liang mesurait par contre (je sais on ne dit pas "par contre",l'Académie française, fort versatile, a exclu "par contre" en 1932 après l'avoir admis en 1835 et en 1878 (Grevisse) Les Immortels ne sont jamais à une chinoiserie près mais c'est comme "autant pour moi", je préfère cette locution et vu ce que vous payez pour partager ce haletant rode mouvi il me semble que vous n'avez rien à réclamer !), Liang mesurait donc l'absurdité du choix des festivités. C'est bien ce que je m'étais dit aussi au moment où j'écrivais ce programme, mais ils n'avaient rien voulu savoir.
Un match de foot cela ne présente aucun intérêt. littéralement, un match de foot, c'est une rencontre de pied. Un pied solitaire pouvant difficilement se rencontrer, il faut doubler au moins la mise. On parvient ainsi à un match de feet qui peut être du plus haut intérêt. Voir ce qu'Hitchcock en a tiré avec l'Inconnu du Nord Express Ce sport est gangrené par le pognon, le spectacle est affligeant, mais pas tant tout de même que les supporters. Un stade figure parfaitement l'asile d'aliénés, mais enfin le jeune chinois en a réchappé. Certes de justesse, entre les vols de boulons, de canettes de bières et les charges policières, mais il est rentré de Bergame sain et sauf, heureux de retrouver sa dulcinée, même perchée dans les bras de Jésus. Mais l'état dans laquelle il la récupéra dépassait l'entendement. Comment ces gamins, même dans une Chine lointaine à tous égards, pouvaient ignorer ou douter que les fous de Dieu étaient réellement fous ? Jamais il n'aurait dû laisser Jiao entrer dans ce jeu sombre et abscons. Toujours allongé, la tête sur ses deux poings, subissant les chocs et les éclats sonores ardemment dispensés par sa vieille et néanmoins active compatriote, Liang ne risquait pas de trouver le sommeil. Il prit sa tablette pour tenter un hypothétique dérivatif.
该死!没有! (M... pas de wifi !) Traduction approximative. En fait Liang fait ici allusion à un délicieux contrepoint en vers de Cao Xueqin qu'il enjolive d'une désinence comme s'il s'agissait d'un paradigme alors que 该死!没有 ne se décline pas.
Trois coups violents frappèrent à la porte. Il sursauta, alors qu'il avait fini par s'endormir une paire d'heures, puis s'apaisa pensant à la tonitruante voisine. Trois nouveaux coups firent trembler la porte, suivi d'un mot : police.
Jiao éclata en sanglot, le cauchemar se prolongeait bien au delà de ses modestes capacités. Liang demanda des explications.
- Depuis votre évasion de l'hôpital de Mulhouse vous êtes recherchés. Vous n'avez pas vu le journal ? Nous avons eu votre signalement par un passant qui vous a reconnu alors que vous rentriez hier soir dans cet hôtel...
- Mais nous n'avons rien fait !
- Vous êtes en train de diffuser le comic 19 partout où vous passez et vous appelez ceci ne rien faire ?
- Nous avons quitté un hôpital où l'on nous retenait sans raison. Nous ne sommes plus contagieux, nous portons un masque et nous ne parlons à personne...
- C'est ce que nous verrons. En attendant habillez - vous et suivez-nous au commissariat où vous serez en garde à vue. ça vaut mieux que de passer la nuit au garde-à-vous
Déjà confronté à quelques situations délicates avec la police et notamment lors de leur interpellation sans fondement parmi les Gilets Jaunes sur les Champs, Liang fit preuve de sang froid. Il demanda s'il pouvait contacter un avocat, ce qui lui fut généreusement accordé. Après le traitement infligé à sa femme par les Joyeux Chrétiens, il avait grâce à un compatriote ami sur les résosocios, obtenu les coordonnées de maître Dumont-Pourriti, un avocat très en vogue au barreau de Paris.

" Cet honorable établissement - plaida-t-il - a fait l'objet de moult contrôles à la demande même du gérant et jamais n'a fait l'objet de la moindre réserve, de la plus infime infraction. Et vous voudriez que le noble renard, l'insigne blaireau se voient substitués à de l'ignoble rat ? Nous sommes, monsieur le président, madame et messieurs les jurés, bien au-dessus de ces basses et sordides tambouilles.
Ah ! vous me diriez que par le plus grand des hasards et dans un contexte totalement exceptionnel, l'un de ces rongeurs serait malencontreusement tombé dans la marmite de mon client, Anti Muong, nous entrons là, monsieur le président, madame et messieurs les jurés, dans l’hypothèse improbable pouvant néanmoins nous conduire sereinement sur les chemins de la vérité. Mais enfin quoi, après quatre heures de mijoté, allez distinguer, vous, une chair de rat ou de renard. Sans l'ostensible de la tragédie, nous ne nous en porterions pas plus mal..." Du grand art ! On sent que le grand maître vivait sa plaidoirie. Ce n'était plus Dumont-Pourriti mais Sancetos Dumont
Ayant sauvé et la liberté du chef et la réputation du restaurant, le fameux Dumont-Pourriti, devint une sorte d'icône du quartier chinois. On l'y voyait souvent, non pas attablé - rapport à ses intestins délicats - mais de passage, lorsqu'il embarquait une ravissante personne, bien sous tous rapports, y compris sexuels. D'après ce qui se dit ! On prétend aussi que ce serait l'épouse du chef de la Pagode. Allez savoir...
Toujours est-il que c'est sans doute la raison principale qui fit que l'avocat déboula en un temps record au commissariat du XIIIe. Les flics sont peu portés sur les hommes de robe on ne dénoncera jamais assez leur homophobie face à des travestis qu'ils considèrent souvent comme des empêcheurs d'emprisonner en masse. Cependant l'entrée théâtrale de ce primate grommelant, impressionna les fonctionnaires, non pas tant par son physique que par le fait qu'ils l'avaient vu maintes fois sur TF1 et BFM. Lorsque Dumont put mettre fin à la garde à vue des jeunes époux, une fliquette prit une porte dérobée dans l'espoir de recroiser le plaideur et de lui extirper un autographe "pour sa maman"...
Attendu au palais à onze heures il s'en alla sans prendre le temps de discuter plus avant avec les tourtereaux qu'il venait de libérer.
- Je vous transmettrai mes honoraires à l'hôtel, mais je tâcherai de passer demain lança-t-il alors que son coupé mercedez trépignait des quatre roues. Il avait adressé un clin d’œil à destination de Jiao qui ne l'avait pas laissé indifférant...
Bon, ça ira pour cette fois. Vous êtes nombreux (au moins deux) à vous demander comment je vais m'en sortir avec ses deux embarrassants ambassadeurs du comic 19 en France. Il faudrait bien les renvoyer chez eux, mais je suis désolé, je ne trouve encore aucun vol pour la Chine et l'agence Douce France n'a toujours pas rouvert.
Alors sans doute à un de ces quatre... Dangereuse formule : on sait quel sort la Chine réserva à la bande des Quatre !
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