12.- LE CHAUFFEUR UBER APPRÉCIE BEAUCOUP LIANG -(onzième épisode – suite du 4 juin) - Les mœurs vestimentaires demeurent énigmatiques en Chine. Sans doute car nos visions sont biaisées par la conformation de nos paupières. Particulièrement chez la femme. Elle peut se revêtir d'une robe paysanne extrêmement austère, d'un pantalon prolétaire aussi plat devant que derrière et toute une panoplie d'articles parfaitement rebutants quoique, on le leur souhaite, fonctionnels. Et puis, autrement - sont-ce les mêmes ? - de tenues moulantes et de jupes ultra-courtes qui éveilleraient l'appétit de tous les eunuques de la cour de la dynastie Qing. Oui car contrairement aux versions officielles - jamais bien fiables dans ce pays de farceurs - les empereurs étaient de sacrés Priape luxurieux. Un peu comme si la Chinoise pratiquait l'oxymore de la fripe, allant de l'hyper-farouche à l'extra-friponne.
Jupe serrée et à mi-cuisse, buste généreux et provoquant en pointant haut les regards les plus chastes, Jiao n'y était pas allée avec retenue au moment de s'apprêter pour la grande traversée de l'est de France. Et Liang n'y avait rien vu à redire, enchanté qu'il était de pouvoir poser ses yeux épris sur ce cadeau qui lui était tombé providentiellement, rien que pour lui... Sa main effleurait son pull azur en mohair et ses jambes délicatement musclées enveloppées de soie. A côté, avec ce chandail mal ajusté et ce falzar de toile écru tombant sur des fesses absentes, il figurait l'un de ces laborieux paysans tout droit sorti d'un tableau de Lu Yongzhong...
Cette fois, le chauffeur de taxi n'était pas asiatique mais noir. Cela ne sembla pas enchanter Liang pourtant très ouvert sur le monde et sa diversité. S'il avait eu le choix, il aurait bien traîné dans le XIIIe afin de dégoter un compatriote avec lequel il aurait refait un peu la Chine vue de France ou le contraire. D'ailleurs ce n'était pas un taxi, mais un chauffeur Uber. Car l'agence Nouvelle France - qui prenait notamment en charge les clients de Taï Yang China - confrontée à l'absence de train en raison d'une grève dure - avait improvisé tout en évitant de faire appel à un taxi parisien dont les tarifs sur un trajet de 500 kilomètres aurait avoisiné les 2000 €. Ne comprenant pas bien le rôle de ces électrons libres ni le fonctionnement de notre transport privé, le petit couple n'appela plus leur chauffeur que monsieur Uber. Il s'en amusa plutôt que de s'en formaliser et ne se ferait d'ailleurs plus désigner que sous ce patronyme erratique.
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Le chauffeur Uber en route vers Mulhouse |
Il était sympathique et son rire partait d'une oreille pour s'interrompre in extremis à l'orée de l'autre. Lorsqu'il se fendait la poire son visage ou tout était inversement proportionnel aux minuscules orifices de ses clients, semblait se partager en deux. Jioao, pour tout vous dire, n'avait rien prémédité de sa tenue hyper-sexy d'autant qu'elle ne trouvait en cela rien de répréhensible, ni même d'extravagant. Mais pour avoir tout de même visionné quelques streaming de Youporn avec - ou sans Liang - elle se laissa parcourir par un léger fantasme, qui se rallongea irrépressiblement durant la majeure partie du voyage.
Pourtant la prise en charge fut crispée car Uber exigea du couple qu'il présentât sa carte de crédit avant le départ. Eux avaient compris que l'agence ferait l'avance et qu'ils ne devraient s'acquitter d'un supplément que par la suite. Alors qu'en réalité, il fallait avancer le prix de la course et présenter la facture qui leur serait en partie remboursée... Mais enfin, les jeunes mariées n'avaient pas parcouru la moitié du globe pour se bagarrer avec un chauffeur aussi sympathique qu'athlétique. Il devait bien peser son quintal !
L'ambiance se réchauffa et Jiao, ordinairement plus sage - exception faite évidemment d'une affection soudaine et heureusement brève de tromaranvirus - s'émancipa alors que la skoda Fabia break venait à peine de dépasser Pontault-Combault. Puisant dans la petite centaine de mots dont elle disposait en français, elle titillait gentiment le cube au volant. Tandis qu'Uber rigolait à tout rompre, Liang prenait ces aises à l'arrière, fermant parfois les yeux car la première semaine à Paris, bien plus longue que prévu, l'avait beaucoup éprouvé. Le voyant ainsi se fendre la poire comme cela, il se dit seulement "pourvu qu'il ne soit pas déjà infecté !"
Jiao s'amusait en toute innocence à lui passer la main sur l'épaule pour mieux animer la conversation. Elle se troublait aussi de constater que le chauffeur assis tout près devant elle, présentait une impressionnante boursouflure du pantalon. L'entraînait-elle dans un jeu pervers et dangereux, cette fois sciemment, comme elle l'avait fait - à son corps défendant - entre Wuhan et l'aéroport le jour du départ où se pauvre "taxi" s'était congestionné dangereusement ? Uber qui n'était pas tombé de la dernière averse, pensait bien aussi qu'elle l'emmenait tout droit sur les chemins voluptueux mais peu éthiques de la bagatelle.
Ce qui l'amusait surtout, c'est qu'elle était bien loin d'imaginer que lui, le grand black bien bâti, ne convoitait que les hommes. D'ailleurs Liang, pour fragile qu'il soit, délicat en tout cas, avec ses doigts élancés, son visage poupin et glabre, sa chevelure intense et noire, correspondait en tout point à ce qu'il affectionnait.
Habitant un appartement minable à Saint-Denis, le chauffeur devait d'abord penser à rentrer de l'argent pour payer ses charges, son tout petit train de vie tout en s'efforçant d'engranger quelques bénéfices, afin de gravir quelques étages de son immeuble et dégager ainsi, à minima, son panorama sur la plaine. Hors de question de faire foirer une course qui lui rapporterait dans les 1000 euros pour une hypothétique aventurette. D'autant que dans son quartier et bien ailleurs, partout dans Paris, il pouvait s'offrir tous les coups possibles dans la limite de ses forces...
Fixant régulièrement Liang dans son rétro, l'accompagnant aux toilettes puis devenant un peu plus explicite, en expliquant qu'un trio ne serait pas pour lui déplaire à condition que Jiao ne soit que la force d'appoint, il s'attira les foudres du garçon : 男人与我们在一起。娇是我的我不分享!En d'autres termes, dans le cas où vous ne progresseriez pas assez vite en mandarin populaire, il s'indigna en ces termes: "Chez nous les hommes ne vont pas ensemble. Et Jiao est à moi. je ne partage pas ! "
Ce fut alors un autre voyage. La jeune mariée qui n'avait rien compris et qui n'avait sûrement pas eu l'idée d'érotiser vraiment le trajet, adopta une moue boudeuse. Et son mari, le bras sur son épaule, ferma les yeux et ne les rouvrit que pour la deuxième halte entre Langres et Vesoul. Les Chinois ne consentirent à sortir que pour se dégourdir les pattes, sans commentaire ni autre expression que de se frotter les bras pour signifier le froid.
Vesoul même au mois d'août n'est pas le lieu le plus indiqué pour réchauffer l'atmosphère. "Uber" sans se soucier de l'accord des passagers, s'était branché sur Praline FM, un radio ne diffusant exclusivement que des tubes des trois dernières décennies du XXe siècle. Frédéric François, Les Platters, Céline Dion... n'importe quel passager normalement constitué aura exigé l'arrêt du véhicule pour terminer le voyage à pied. Mais les Chinois qui connaissaient déjà Mireille Mathieu, supportaient cela très bien. Sans doute l'un des nombreux effets de la chloroquine !
Ils allaient se séparer sans effusion mais sans animosité non plus, lorsque le chauffeur annonça le prix de la course : 972 €. Liang crut d'abord qu'il s'agissait de yuans. Il trouva cela très raisonnable. Et ce n'est qu'en examinant le reçu qu'il comprit sa méprise et chercha par tous les moyens à faire annuler la transaction. Il ne parvint pas à joindre l'agence de voyage et se mit en quête d'un policier. Uber tenta d'expliquer au malheureux que c'était les prix les plus bas, qu'il aurait pu en avoir pour bien plus cher avec un taxi classique et qu'il pourrait se retourner contre la SNCF, que l'agence devait bien avoir une assurance, que lui même d'ailleurs était probablement couvert pour ces risques. Mais la détresse de Liang affecta autant que cela l'agaça le chauffeur, qui finit tout de même par déposer les valises devant l'hôtel "Le Cocardier" et se tirer puisque le paiement avait effectué.
Depuis qu'ils avaient posé le pied sur le sol français, frappés par ce Comic-19 encore inconnu des autorités médicales française que l'OMS alerterait le même jour que le docteur Luca Rabin, ils n'avaient passés une aussi mauvaise soirée. Certes l'épisode des tenues jaunes et le séjour tendu au commissariat n'avaient pas été de tout repos, mais cela s'était au moins mieux terminé.
Jiao et Liang, de familles modestes, débutants dans leur métier avec des salaires très moyens, venaient de dépenser dans une mauvaise bagnole et 7 heures de route, l'équivalent d'un mois de travail ! Ils appelleraient demain l'agence pour se refaire créditer cette somme payée indûment et au besoin, la maman de Yang, chef de guichet à la Bank of China de Shanghai, afin de faire opposition. 1000 euros c'est ce qu'avaient prévu les amoureux pour leurs faux-frais des trois semaines que durerait le séjour et déjà les suppléments de l'hôtel de Rivoli ne les avaient pas épargnés.
Et comme décidément rien ne devait aller, tandis qu'ils commençaient à bien se détendre après avoir sifflé la première bouteille d'edelzwicker, ont leur servit en demi-pension, de la saucisse et du jarret bouilli dans une préparation de légume étrange et aigre. Il appela la serveuse et lui signifia que le plat était acide et trop fort, il se vit objecté sans ménagement - car les Alsaciens y mettent rarement les formes - que ceci était le goût normal et que l'on venait de partout dans le monde pour savourer cette merveilleuse spécialité : la choucroute !
Nous voici donc dans la capitale de la Basse Alsace et du Haut Rhin. Demain Jiao retrouvera les Joyeux Chrétiens du monde entier. Liang partira sur la route des vins en attendant le train pour Bergame en espérant que l'express partant de Bâle ne sera pas supprimé aussi et que ce sera sans supplément ! Quant à nous on se retrouvera vendredi prochain. Si le tromaranvirus ne nous a pas tous étouffés...
Tandis que sur touiter le neuneu président des Etats-Unis déblatère, insulte, calomnie et fait se battre la terre entière juste pour entretenir le buzz et ses followers (des cons en bon français), le psychopathe qui sert de président au Brésil tient ses meetings et ses électeurs sur fessebouc. Hier il aurait demandé à ses partisans des zéros socios d'aller filmer les hôpitaux pour démontrer qu'ils n'étaient pas saturés. Histoire de démontrer que le Brésil n'était pas plus touché que ça par le virus, alors qu'en réalité la Covid 19 est en passe de battre des records de victimes en Amérique et notoirement dans ces deux pays sous dictature populiste.
Et alors ce qui m'épate c'est qu'il y ait encore tant de gens sur ses réseaux de merde. Tant de gens qui loin de culpabiliser, assument parfaitement, quand ils n'en sont pas fiers !
C'est bon pour le Morel !
Je ne peux plus écouter France Inter le matin. Impossible de digérer le trio Demorand, Salamé, Rebeihi. Cela me provoque nausées et flatulences toute la journée et le regrette, car une des rares choses acceptables sur cette antenne ralliée à la cause libérale, ce sont les humoristes de 8 h 55. Mais surtout l'un d'entre-eux, le vendredi. Le magnifique, l'auguste jongleur de mots et d'idées, de vacheries et de bonté, François Morel. La voix irrésistiblement drôle des Deschiens -on n'a jamais fait mieux !- la délicatesse, la sensibilité, la subtilité d'un chroniqueur qui met du coeur, des tripes, des couilles à l'ouvrage, c'est selon, mais parfois un peu de tout ça pour un mélange d'émotions qui, personnellement, me bouleverse.
Grâce à l'ami Francis B. de la R. je vous relaie donc sa chronique de vendredi dernier. Lorsqu'il prend Piccoli pour le rapprocher de Reggiani tout en se servant de la sublime toile de fond de Vincent, François, Paul et les autres, un chef d'oeuvre du cinoche à la papa, dialogué par Jean-Loup Dabadie. Cela fait appel à beaucoup de morts, pensez-vous. C'est qu'elle nous rattrape et attrape ceux que l'on a tant aimé. Tiens ! d'ailleurs il ne manque que Bedos. Il n'aurait pas dépareillé.
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