samedi 30 mai 2020



29.- AU LIT AVEC CHARLIE ! - Voici 15 jours que je ne peux plus lire ni " Canard ", ni Charlie. Cette absence des kiosques n'a pas de rapport direct avec le virus. Ceux qui se sont fait tirer dessus, massacrés par deux fous de dieu, deux fous tout court et les autres qui reçoivent des sacs postaux bourrés d'insultes et de menaces, ne sont pas du genre à se laisser dégonfler par une pandémie qui aura effrayé - et il parait que ça va encore durer ! - ceux qui de manière générale ont besoin d'avoir peur et qui ne détestent pas d'obéir aux ordres, quels qu'ils soient pourvus qu'ils viennent d'en-haut ! 
Vous me direz, si vous êtes une tant soi peu au courant, qu'on peut toujours acheter la version numérique. Bien vu ! Mais très peu pour moi. J'arrive à écrire sur mon ordinateur, à lire le courrier de mes amis, j'y fais quelque courses, consulte quelques sites pornos comme Marlène Schiappa, Jean-Baptiste Djebarri et une grande partie du gouvernement, j'apprends aussi pas mal de choses et c'est aussi là que je prends les informations sommaires qui, avec un peu de radio le matin, me sortent de mon isolement de "désinformé volontaire". Quant à lire un journal quotidien ou satirique sans papier, sur un écran, j'ai beau essayé, je peux pas. L'envie de lire me passe. D'autant que lorsque je me fais le Canard ou que je me tape Charlie, j'aime que ce soit au lit. Pas en position du missionnaire, mais la tête haute - grâce à l'oreiller -. C'est confortable de s'endormir - aux côtés de son épouse qu'il ne faut jamais oublier - avec d'excellents camarades qui accomplissent encore leur boulot consciencieusement et complètement. 
Mais leurs journaux privés de kiosque, jusqu'à quand ? Et la faute à qui ? A la CGT pardi ! Au syndicat partenaire historique des NMPP distributeur historique du "papier" en France, devenu donc Presstalis, qui s'étonne qu'après la purge désastreuse de 2012 où 1200 postes d'agents avaient été supprimés, il soit encore question d'un plan social mettant en cause 500 emplois. Ainsi la diffusion des journaux deviendrait plus lacunaire et folklorique encore que la distribution du courrier. 
La faute à qui, demandais-je ? Ben un peu à nous tous. A internet d'abord qui en facilitant l’accès à l'information, l'accès à tout d'ailleurs et bien au delà, favorisa grandement le réflexe humain, si ce n'est légitime, de céder à la facilité. En effectuant des économies substantielles. Car la presse, magazine surtout lorsqu'elle est de qualité, est devenue chère. L'offre s'est également multipliée - je pense aux revues pour les femmes, pour les sportifs, pour les amateurs de télé évidemment, les fans de cuisine, de bricolage, de loisirs. Idem pour la politique. A gauche, ils sont déjà au moins quatre sur le créneau, alors qu'il n'est pas certain que nous soyons encore quatre à avoir vraiment des idées de gauche ! Malraux affirmait que la télé ne tuerait ni la presse ni le cinéma et il avait raison. Mais il a la chance de ne pas avoir survécu à l'apparition d'internet. Le fossoyeur de la culture traditionnelle, à laquelle il faut évidemment rajouter le livre, c'est lui ! 
D'autant qu'après avoir un moment offert de belles perspectives culturelles et de la relation sociale conviviale et de bon aloi avec les mails, le monstre s'est éveillé à la fin des années 2000 avec l'avènement des réseaux sociaux qui fabriquèrent en moins de temps qu'il ne faut pour l'écrire, une internationale de la bêtise dont ont mesure bien désormais qu'elle restera sans limite. Je suis toujours épouvanté d'entendre un brillant animateur de France Culture, conclure son émission par ses mots : " Et rendez-vous sur notre page facebook..." Et même si dans ce cas exceptionnel il s'agit d'une invitation à l'intelligence, c'est aussi une manière de banaliser et d'approuver le caractère grossier, inepte et délétère de ces zéros-socios. 
Et je rêve pour le coup d'une réelle distanciation sociale, non pour éviter les gouttelettes chargées de Covid 19, mais pour en finir avec ces tyrannies abjectes, de cet interne(t)ment du quant à soi et des amitiés réelles. Où tout le monde s'aime mais personne ne se connaît vraiment, où chacun dit la sienne mais ne prend jamais la peine de réfléchir. 
Nous sommes aussi largement responsables parce que nous avons nous même cessé d'inculquer à nos enfants le goût de la lecture, la magie de ces parfums mêlées d'encre sur le papier et de croissant au café. Nous avons couru comme des dératés- des ratés en somme ! - vers la modernité. 
Ce sont les journaux eux-mêmes qui se sont peu à peu
déconsidérés en réduisant leurs effectifs et en muselant parfois leurs journalistes. Ça sent le vécu, comme dirait l'autre, puisque je me suis barré lorsque j'ai senti que je n'étais plus libre de mes écrits.
La crise vient encore de la disparition des grands patrons de journaux qui en étaient souvent les fondateurs. J'ai connu Jean-Luc Lagardère, patron de presse visionnaire et généreux, puis son fils Arnaud, uniquement soucieux d'affaires, de frime et de pognon. En trente ans le galopin amateur de voitures et de tennis, a liquidé la société paternelle dont Hachette était le fleuron, justement propriétaire des NMPP en perdition. 
II y a prés de dix ans de cela j'avais dans mon premier blog d'alors, déploré la fermeture de la maison de la presse, seul revendeur de journaux à Cuers (près de Toulon dans le Var). Pour acheter Var Matin cela se passait à la boulangerie, et pour Charlie ou Marianne il fallait prendre sa bagnole en direction du centre commercial. Deux ans plus tard, un nouveau marchand de journaux rouvrit au coeur de cette commune de 14000 habitants. C'était un brave garçon qui avait aménagé un bel espace pour le loto sportif, l'euro-million et cash. Lorsque je lui demandai où se trouvait le Canard, il me fit préciser qu'elle était la spécialité du magazine ! J'ai failli lui répondre : la chasse, mais j'ai préféré partir. Ecoeuré. 
Voici pourquoi l'on ne trouve plus nos journaux, parce qu'ils ont été pilonnés par une société de gougnafiers !

Nadau et Pengabelot

Tiens c'est samedi, je suis un peu à la bourre. Alors je vous mets un peu de Nadau. 
C'est plus léger que d'habitude et magnifiquement entraînant.
Avec ça soyez assurés de passer une bonne journée...

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