mercredi 8 avril 2020


  

L'homme est confiné, la nature retrouve un peu de sérénité et de liberté. Ce matin un
faisan royal est venu frapper au carreau. Je l'aurais bien invité à dîner... mais il avait à faire !


7.- LE GRAND EFFROI DE MADAME CIAN - Elle s'apprête à chevaucher son vélo électrique dans l'obscurité de ce 4 novembre. Jiangxia, où Mme Cian doit se rendre, n'est pas à plus d'un quart d'heure de la maison. Cela lui permet aussi de s'éveiller physiquement pour sa longue journée de travail par trop statique. Pourtant, à peine mis une roue dehors, elle se ravise. Un bise mauvaise jette au visage une poignée de grésil insoutenable. La peau à vif, les fines paupières closes et les narines assaillies interdisent toute sortie aventureuse. La saison froide s'introduit sur la province du Hubei et surprend cette femme qui pourtant, entre dans ses soixante-neuf hivers.
Elle ne conduit pas et convoque d'urgence un taxi. Parfois son compagnon M. Ping, l'emmène. Or là, le malheureux se morfond au lit, cloué par une grosse bronchite. Mais à six heures la circulation est fluide entre Zuhankou et Jiangxia. Elle n'aura aucun retard.
D'un pas léger et vif, elle rejoint son laboratoire où elle s'honore d'entrer la première avant sept heures et qu'elle ne quitte jamais avant dix neuf heures, en prenant soin toujours, d'être celle qui éteint les lumières. Mme Cian est directrice du pole expérimental de l'Institut de virologie de Wuhan. Après avoir bénéficié des importants travaux de maître Shampoliong qui décrypta - avant les américains - le génome complet d'un nouveau virus cultivé dans un substrat houbloneux mexicain baptisé corona, elle et son équipe travaillent désormais sur le système immunitaire pouvant faire front à ce redoutable prédateur.
Car rien ne permet de dire que l'humanité demeure à l'abri pour encore longtemps d'un virus invasif de la lignée des SRAS pouvant muter aisément en SARS, MERS, COVID et toute la smala... Dans ce labo aux larges baies vitrées, ouvrant sur les méandres harmonieux et larges du Yangtze et la bambouseraie du Panjiawanzhen, l'une des principales réserves de pandas géants du Ganzu, d'autres animaux, derrière leurs cages de verre, semblent scruter sans horizon, le ciel plombé de neige et de particules.
M. Thuang, le directeur administratif de l'Institut se charge une fois par mois, le lundi, de conduire une visite pédagogique destinée aux étudiants des universités de science et médecine. Plus rarement, ce sont de jeunes collégiens qui découvrent, comme aujourd'hui et pour une demi-heure seulement,  cet univers encore bien abstrait. La chercheuse n'y tient pas : "Ils n'ont d'intérêt que pour les bestioles - s'était-elle plaint auprès de M. Thuang
- ce n'est pas un zoo ici ! "  Le directeur qui respectait sa collègue infiniment, avait incliné la tête en signe d'allégeance, mais n'avait pas manqué d'en rire en dévalant les escaliers.
Une odeur âcre de produits chimiques envahissait le laboratoire en cette fin de journée où les différents tests s'avéraient peu concluants. Mme Cian semblait excédée, épuisée et manquant d'air, elle ordonna à son jeune assistant sur un ton sec : "打开窗户和门,使其顺风顺水!" Oh pardon, j'ai tellement l'habitude de penser chinois qu'il m'arrive, emporté par l'enthousiasme, de l'écrire aussi. " Allez vaï, ouvre un peu la fenêtre et la porte que ça fasse courant d'air. On s'étouffe, là !"
Distraite par quelques détails pouvant avoir leur importance, touchant essentiellement à l'étude d'association pangénomique dans le processus de séquençage de l'ADN, elle ferma le labo en oubliant son sac à main. Elle s'en aperçut au seuil de la maison et dut déranger ce pauvre Ping qui n'allait guère mieux. Pourtant Cian, elle, semblait plus légère. Elle se fit couler un bain en chantonnant O Catarinetta bella tchi-tchi. Elle séquença aussi tchi-tchi en jetant chaque fois un glaçon dans son verre de whisky cristallin, une jambe repliée. Elle ressortit en pyjama. Un bol de soupe au tofu bio, et au lit !
Le lendemain, ne restait qu'un halo de poussière dans un azur retrouvé. Madame Cian fut heureuse d'enfourcher sa bicyclette et de filer libre vers Jiangxia. Elle sifflotait encore 凯瑟琳·贝拉·奇奇 - ah ! excusez-moi encore et toujours ce fichu mandarin dans la tête, je voulais dire O Catarinetta -. Elle cessa de siffler net, lorsque, entrant dans le labo, elle trouva l'une des fenêtres grande ouverte et la porte d'en-face, béante. Son premier réflexe fut d'examiner nerveusement son sac oublié la veille, mais elle fut vite apaisée. Tout était en place. Vite, mais pas longtemps !
Tandis qu'elle enfilait une blouse propre, elle avisa l'une des cages mal fermée. Prise de bouffée de chaleur, elle la referma vivement sur son occupant endormi. Mais lorsqu'elle fit le tour, elle découvrit, stupéfaite que tous les loquets avaient été levés.
Dans une indicible panique, allant et venant sans parvenir à ordonner ses gestes et pensées, elle s'effondra en larmes, dut se poser à même le sol, la tête dans les mains. C'est un léger chatouillement le long de sa cuisse qui la fit émerger. Un adorable hamster s'accrochait avec ses deux pattes antérieures pour tenter de gravir la jambe de la virologue. La petite bête de laboratoire était infectée. Ou pas ! Elle ne savait plus à quel groupe elle appartenait.
La "une" de l'un des rares médias encore
supportable dans un pays où les drames servent
beaucoup de causes, mais rarement celle
de l'humour
Mais lorsqu'elle eut refermé les cages, Madame Cian constata que deux d'entre-elles étaient vides. Une chauve souris et un pangolin, s'étaient fait la malle. Elle le comprit assez vite car il n'y a dans son labo aucun recoin, afin de rendre la désinfection plus facile. La désinfection se dit-elle ? Serait-ce M. Zuyang, ordinairement si prévenant et soigneux, qui aurait sciemment ouvert les cages et n'aurait pas refermé porte et fenêtre ! Accablée elle put vérifier sur le tableau d'entretien que l'agent en question n'était pas passé. Mais qui avait pu manigancer un tel maléfice ?
Mme Cian ne parvenait toujours pas à relier  les fils de cette stupéfiante affaire mais, recouvrant suffisamment ses esprits, elle décida d'aller chercher un autre chiroptère ainsi qu'un manidé dans la réserve, pour les substituer aux fuyards en occultant l'incident. Chef d'unité, virologue respectée, elle ne se voyait pas assumer une telle négligence...
Si vous êtes familiers de Macronique, vous aurez évidemment découvert le 31 mars dernier, le début du scénario d'un film dont je m'étonnais qu'il ne fut jamais imaginé par les maîtres de l'anticipation. Nous avions alors découvert un homme marchant seul dans un décor figé, une ambiance pesante, interpellé et mis aux arrêts. Tandis qu'en haut lieu, la panique régnait. Il s'agissait ici, cette fois, d'un flash back, nous ramenant, peut-être, aux origines de la pandémie.
il n'est pas impossible que là encore, ce soit un peu "romancé". Et si vous voulez mon avis, ce n'est peut-être pas fini. Merci pour votre fidélité et ne vous éloignez pas trop, la suite arrive dans quelques jours.Si un petit déplacement en Chine vous tente...

CONCOURS DE MASQUE


La Lozère se protège et Denise S. n'hésite pas à arborer une splendide
tête de bête du Gévaudan. Seul risque - mais probablement calculé car
la dame commence à avoir un peu d'expérience - elle pourrait effrayer
les enfants. Alors que sans masque ce n'est pas du tout le cas !  Et tant
qu'à faire elle se penche aussi sur la problématique animale locale.
Nos "aubracs" ne vont pas tarder à être déconfinées.
Aussi cette année, plutôt que de porter des calicots et autres branches
de genêt, elle pourraient monter avec de jolis masque tracés avec
plus ou moins d'imagination...

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